dimanche 27 octobre 2013

Yeah, 1996, Gare du Nord, 18ème.

J'aime bien, c'est beau.










Le « Mur de Fer » de Christo, rue Visconti


Le contexte
Christo Vladimiroff Javacheff, né le 13 juin 1935 à Gabrovo en Bulgarie, s'installe à Paris à la fin des années 1950. Pour gagner sa vie, il peint sur commande des portraits de personnalités dans le style XVIIe. En plus de cette activité très lucrative, l'artiste façonne son style en réalisant des amoncellements et des emballages d'objets (machine à écrire, moto...). 
Les faits 
En octobre 1961, changeant pour la première fois d'échelle, l'artiste Christo dépose une demande d'autorisation aux services municipaux de Paris pour son projet de « Mur provisoire de tonneaux métalliques » rue Visconti. Le dossier comprend un montage photo illustrant le projet et un texte expliquant que « le Mur sera élevé entre les numéros 1 et 2 [de la rue Visconti], fermera complètement la rue à la circulation, coupera toute communication entre la rue Bonaparte et la rue de Seine ». La nature des « tonneaux » est détaillée : ils sont « destinés au transport de l'essence et de l'huile pour voiture (estampillé de marques diverses : ESSO, AZUR, SHELL, BP et d'une contenance de 50 l ou de 200 l ». L'autorisation ne leur est pas accordée.

Pourtant, le 27 juin 1962, à 21 h, « devant une foule d'amis et sous les yeux des habitants de la rue Visconti, médusés, en l'espace de quelques minutes, [Christo] a déchargé d'un camion de 5 tonnes une cinquantaine de tonneaux bleus, blancs, jaunes, rouges ». La rue est ainsi barrée pendant 8 h par une barricade infranchissable de 4,30 m de haut, et Christo est emmené au commissariat, sans pour autant être poursuivi. 

Où sont les images de l'installation ?
Jean-Dominique Lajoux est un ami d'ami de Christo. Le photographe était régulièrement chargé de photographier les oeuvres de l'artiste. Le soir de l'installation rue Visconti, il photographie le mur de bidons éclairé par des projecteurs (l'endroit où ils étaient branchés a été oublié) avec un appareil grand format 13X18. Il prend un ou deux clichés, uniquement du côté du mur faisant face à la rue de Seine et rentre chez lui s'occuper de ses enfants. 

Il n'existe à notre connaissance pas d'autre image du mur de bidons. L'unicité de l'image est cohérente avec le mode de fonctionnement de l'artiste qui se rémunère sur les droits d'auteur des photos de ses installations. Le journal France Soir, par exemple, utilise l'image de la maquette du projet (sans le préciser) probablement pour ne pas avoir à s'acquitter des droits de reproduction liés à l'oeuvre. 

Pourquoi aucune autre photo de l'installation ne circule ? Tout d'abord, les témoins de l'événement sont rares. Il nous a été précisé qu'il n'y avait pas plus d'une dizaine de spectateurs ce soir là. D'autre part, l'installation clandestine ayant été montée et démontée de nuit, peu de gens avaient l'équipement nécessaire pour la photographier, à une époque où les flashs étaient volumineux et onéreux. 

Combien y avait-il de bidons ?
On compte une centaine de bidons sur le cliché officiel de l'événement, environ 75 sur la maquette du projet, et France Soir (28 juin 1962) en a compté une cinquantaine. Pourtant, le site officiel de Christo en « déclare » 240, là où le texte du projet estimait de 80 à 150 le nombre nécessaire de tonneaux selon leur volume. A noter que ce dernier détail ne figure pas dans la transcription du texte sur leur site Internet. Est-ce une tendance à l'exagération ? C'est possible, surtout quand on lit, toujours sur leur site, que leur installation « a bloqué la quasi-totalité du trafic de la Rive Gauche ». Est-ce de l'humour ?

Pourquoi avoir érigé l'« Iron Curtain » ?
Les auteurs du mur déclarent aujourd'hui avoir voulu protester contre l'édification du Mur de Berlin (août 1961). Cela est perceptible dans le texte descriptif de leur projet. Christo y parle avec ironie du Mur de la rue Visconti comme un « rideau de fer » pouvant « s'utiliser comme barrage durant une période de travaux publiques, ou servir à transformer définitivement une rue en impasse. Enfin, son principe peut d'étendre à tout un quartier, voire à une cité entière ».

Là encore, il y a eu de nombreuses variantes dans les interprétations de l'installation. Certains témoins directs précisent, pour commencer, que le happening était en lien avec une exposition à la galerie Drouin (5, rue Visconti). D'autres disent que c'était pour attirer l'attention sur les dangers d'explosion de la société de consommation, ou bien annoncer une France coupée en deux. Le journal France Soir du 28 juin 1962 indique, quant à lui, que Christo « recréait pour une heure [...] ce qui l'avait séduit dans les ports de commerce : les monuments que les dockers créent en accumulant au hasard des caisses ». Et Christo d'ajouter : « Moi, c'est le bidon, les bidons les uns sur les autres ». Même si le Mur de Berlin a en effet pu inspirer Christo, il ne semble pas que le Mur de la rue Visconti soit, comme il le dit aujourd'hui, une protestation politique, mais plutôt un geste artistique symbolique.

Christo et sa femme sont connus pour leurs installations spectaculaires comme l'emballage du Pont-Neuf à Paris ou celui du Reichstag à Berlin. Leur installation rue Visconti est l'une des toutes premières.




Et à voir pour les incultes(j'avais déjà vu leurs "emballages", mais pas cette série des bidons) comme moi: http://www.christojeanneclaude.net/projects/the-wall---13000-oil-barrels#.UnDJXjmWHOw, complètement fou...







Quelle beauté toutes ces couleurs...

Ah, si j'suis tombé là-d'ssus, c'est parce qu'au gré de recherches diverses, j'ai cru en premier lieu que c'était des capuchons, de sprays allongées...

2 commentaires:

  1. J'voyais bien ses emballages qui ne m'émeuvaient que moyennement mais là, j'aime bien.
    Ca a un autre sens tout de même, cette rue bloquée.

    RépondreSupprimer
  2. Yes! Il faut suivre les projets en cours, notamment celui en arabie ou il s'agit encore une fois de "barils" mais cette fois ci, un nombre inconsiderable!

    RépondreSupprimer